Publié par Sherry Cooper
Le BSIF se prépare à resserrer la réglementation des banques.
L’affaiblissement des marchés du logement pose un risque pour l’économie canadienne
Le 18 avril, l’organisme national de réglementation des banques, le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF), a publié son deuxième Regard annuel sur le risque. Il y indique ce qu’il considère comme les risques les plus importants pour le système financier canadien – et ce qu’il compte y faire.
Selon le rapport, l’enjeu le plus pressant est la forte baisse des prix et de la demande de biens immobiliers à la suite de leur forte hausse pendant la pandémie. Le BSIF constate que le marché du logement a beaucoup changé dans la dernière année, et que les prix des maisons ont nettement baissé en 2022. Il se prépare à la possibilité que le marché du logement demeure anémique tout au long de 2023.
Le rapport met aussi en lumière la façon dont les hausses de taux de la Banque du Canada ont affecté la capacité des emprunteurs de rembourser leurs prêts hypothécaires. La banque centrale a augmenté le coût de référence des emprunts huit fois entre mars 2022 et janvier 2023. Le taux de financement à un jour est passé d’un creux de 0,25 % pendant la pandémie à 4,5 % aujourd’hui.
Des emprunteurs hypothécaires pourraient être incapables d’assumer encore des hausses de leurs mensualités, ou pourraient subir un choc de paiement au moment du renouvellement de leur prêt, ce qui pourrait augmenter le risque de défaut. Compte tenu de l’importance des activités de prêts garantis par un bien immobilier dans le système financier canadien, un affaiblissement du marché immobilier constitue un risque majeur.
Le BSIF souligne aussi les dangers découlant du fait que davantage d’emprunteurs arrivent à leur taux critique. Selon une étude de la Banque Nationale, sur 10 emprunteurs ayant contracté un prêt avec un taux variable et des paiements fixes entre 2020 et 2022, huit sont touchés. Les prêteurs ont réagi à ce problème en prolongeant la période d’amortissement des emprunteurs concernés, mais le BSIF estime que c’est seulement une solution temporaire.
Tant les emprunteurs que les prêteurs devront payer le prix un jour, comme le fait remarquer le BSIF. L’augmentation du nombre d’emprunteurs fortement endettés augmente le risque d’un affaiblissement du rendement du crédit et, éventuellement, d’une augmentation des défaillances d’emprunteurs, d’une réaction désordonnée du marché ainsi que d’une incertitude et de volatilité dans l’économie.
Ces récents commentaires renforcent les attentes selon lesquelles des règles hypothécaires plus restrictives pourraient être adoptées avant la fin de l’année. En janvier, le BSIF annonçait qu’il envisageait de réviser sa ligne directrice B-20 qui fixe des règles sur les emprunts et les risques pour les banques souscrivant des prêts hypothécaires résidentiels, et sur l’admissibilité des emprunteurs – y compris le test de résistance hypothécaire.
Le BSIF pourrait resserrer les exigences quant au ratio d’amortissement de la dette, faisant qu’il serait plus difficile pour des personnes fortement endettées d’obtenir un prêt hypothécaire. Il envisage aussi de limiter le nombre d’emprunteurs fortement endettés les banques peuvent avoir dans leur portefeuille, ce qui pourrait faire en sorte que davantage d’emprunteurs ne seraient pas admissibles auprès des prêteurs « A » et devraient s’adresser à des prêteurs alternatifs.
Enfin, le BSIF pourrait modifier le critère seuil du test de résistance hypothécaire. Actuellement, les emprunteurs doivent prouver qu’ils sont en mesure d’assumer leur prêt hypothécaire à un taux soit de 5,25 %, soit de 2 % au-dessus du taux qu’ils obtiennent de leur prêteur, selon le plus élevé des deux. Cependant, à la suite des hausses rapides de taux de l’année écoulée, le seuil de 5,25 % est devenu dépassé puisque tous les taux du marché sont au-delà de 3,25 %.
Le BSIF a conclu les consultations sur les modifications proposées à la fin de la semaine passée. Il présentera un rapport sur ses recommandations. Les emprunteurs devraient être attentifs aux changements possibles dans les mois à venir.