Publié par Sherry Cooper
L’inflation au Canada baisse à 4,3 % sur un an en mars – le plus bas niveau depuis août 2021.
De bonnes nouvelles sur l’inflation
L’Indice des prix à la consommation (IPC) a chuté en mars à 4,3 % sur un an, poursuivant sa tendance à la baisse. Avant de célébrer cependant, il faut noter que la diminution est largement attribuable à ce qu’on appelle l’effet de glissement annuel : les prix avaient fortement augmenté en mars l’année passée (1,4 % sur un mois).
Les prix de l’essence ont nettement baissé depuis mars 2022, perdant non moins de 13,8 %. Voilà deux mois de suite que l’évolution des prix de l’essence fait chuter l’inflation. Le recul des prix de l’essence a été principalement attribuable aux fortes hausses des prix observées en mars 2022, soit de 11,8 % d’un mois à l’autre, en raison de l’incertitude liée à l’offre causée par l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Les prix du pétrole brut avaient alors progressé, faisant augmenter les prix à la pompe au Canada. L’inflation des prix de l’essence était passagère.
Il ne fait aucun doute qu’une inflation réduite laisse entrevoir un prolongement de la pause dans les hausses de taux d’intérêt de la Banque du Canada.
À 4,3 %, l’inflation était la plus faible depuis août 2021. D’une année à l’autre, les Canadiens ont déboursé davantage pour les coûts de l’intérêt hypothécaire, dont la hausse a été contrebalancée par un recul des prix de l’énergie.
Sans les aliments et l’énergie, les prix se sont accrus de 4,5 % d’une année à l’autre en mars, après avoir augmenté de 4,8 % en février. L’IPC d’ensemble excluant le coût de l’intérêt hypothécaire a crû de 3,6 %, après avoir progressé de 4,7 % en février.
Deux importantes mesures annuelles surveillées de près par la banque centrale – les taux dits tronqué et médian – ont également diminué, soit à en moyenne 4,5 %, ce qui concorde avec les prévisions.
Sur une base mensuelle, l’IPC a affiché une croissance de 0,5 % en mars, contre 0,4 % en février. L’augmentation des prix des voyages organisés (+36,7 %) a contribué le plus à la variation d’un mois à l’autre de l’IPC global, en grande partie en raison de la demande saisonnière accrue observée durant la semaine de relâche en mars. Sur une base mensuelle désaisonnalisée, l’IPC a progressé de 0,1 %.
Même si la croissance de l’inflation globale a ralenti au cours des derniers mois – elle a crû de 1,7 % en mars par rapport à six mois auparavant –, les prix sont demeurés élevés. Comparativement à 18 mois plus tôt, par exemple, l’inflation s’élève à 8,7 %.
D’une année à l’autre, la croissance des prix des biens durables a ralenti en mars (+1,6 %) par rapport à février (+3,4 %). La baisse des prix des meubles, qui ont reculé de 0,3 % d’une année à l’autre en mars après avoir augmenté de 7,2 % en février, a contribué le plus au ralentissement de la croissance des prix des biens durables. La diminution des prix des meubles est surtout attribuable à un effet de glissement annuel; les prix des meubles avaient grimpé de 8,2 % d’un mois à l’autre en mars 2022 dans le contexte de problèmes relatifs à la chaîne d’approvisionnement.
La croissance des prix des véhicules automobiles, qui a ralenti d’une année à l’autre en mars 2023 (+4,7 %) par rapport à février (+5,3 %), a également contribué au ralentissement de la croissance des prix des biens durables. La hausse des prix des véhicules automobiles enregistrée en mars 2022 sous l’effet des pénuries de puces à semi-conducteur a exercé une pression à la baisse sur l’indice en mars 2023.
D’un mois à l’autre, les prix des véhicules automobiles neufs ont augmenté de 1,3 % en mars en raison de la plus grande disponibilité de nouveaux modèles de l’année 2023. À titre de comparaison, les prix des véhicules d’occasion ont augmenté de 0,6 % d’un mois sur l’autre en mars, après avoir enregistré une baisse de 1,9 % en février.
La croissance du coût de remplacement par le propriétaire a continué de ralentir en mars – le coût a affiché une hausse de 1,7 % d’une année à l’autre après avoir enregistré une augmentation de 3,3 % en février – en raison d’un ralentissement général du marché du logement.
En revanche, le coût de l’intérêt hypothécaire a progressé à un rythme plus rapide en mars (+26,4 %) par rapport à février (+23,9 %). Il s’agit de la plus forte hausse annuelle jamais enregistrée, au moment où les Canadiens continuaient de renouveler ou de contracter des prêts hypothécaires à des taux plus élevés.
Il y a enfin un allègement de l’inflation des prix de l’épicerie. D’une année à l’autre, les prix des aliments achetés en magasin ont augmenté à un rythme plus lent en mars (+9,7 %) par rapport à février (+10,6 %). Le ralentissement de la croissance des prix est attribuable à la baisse des prix des fruits et légumes frais.
L’inflation des services a ralenti, s’établissant à 5,1 % en mars. Cependant, les pressions salariales pourraient grimper, considérant que plus de 155 000 fonctionnaires fédéraux pourraient déclencher une grève mercredi à défaut d’une entente avec le gouvernement du premier ministre Trudeau d’ici mardi soir.
En somme
La Banque du Canada est certainement enchantée de voir que l’inflation continue de se calmer. Elle prévoit que la hausse des prix sera de 3 % d’ici le milieu de l’année, et reviendra près de sa cible de 2 % d’ici la fin de 2024. Elle reconnaît toutefois que le retour à 2 % pourrait être plus difficile du fait que les attentes d’inflation baissent lentement, et que les prix des services autant que la croissance des salaires demeurent élevés.
Lors de récentes réunions au FMI et à la Banque mondiale, le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a affirmé que la Banque du Canada est prête à mettre fin au resserrement quantitatif plus tôt que prévu si l’économie a besoin de stimulation. Le resserrement quantitatif est effectué en vendant des obligations du gouvernement que détient la Banque, ce qui retire des liquidités de l’économie.
Le gouverneur Macklem a dit que dans les délibérations en vue de la décision du 12 avril de la Banque, des hausses de taux avaient été envisagées, et il a réitéré qu’« il est bien trop tôt pour penser à réduire les taux d’intérêt ».
Ses commentaires donnent un aperçu de la stratégie de la Banque du Canada visant à réduire son bilan. Celui-ci avait gonflé à plus de 570 milliards de dollars pendant la pandémie, quand la Banque avait acheté de grandes quantités d’obligations du gouvernement afin de rétablir le fonctionnement du marché au début de la COVID, puis pour stimuler l’économie.
Les commentaires indiquent aussi que les responsables des politiques pourraient modifier leurs plans si un choc économique négatif exigeait un assouplissement de la politique monétaire.
Selon Bloomberg News, les opérateurs boursiers parient maintenant que la Banque du Canada décrétera une baisse de taux plus tard cette année. Le gouverneur a voulu tempérer ces attentes lors d’une conférence de presse cette semaine. À la Banque, on a discuté de la possibilité que les taux doivent « rester restrictifs plus longtemps pour ramener l’inflation à la cible ».
Lors d’un discours qu’il prononçait le mois dernier, le sous-gouverneur Toni Gravelle a dit que le resserrement quantitatif cesserait sans doute à la fin 2024 ou au début 2025. C’était la première fois que la Banque du Canada avançait une date pour la fin du programme.