Publié par Sherry Cooper
Les ventes résidentielles ralentissent encore en mai au Canada; le marché devient favorable aux acheteurs dans le Grand Toronto.
La correction du marché du logement s’accentue en mai
Selon les statistiques publiées aujourd’hui par l’Association canadienne de l’immeuble (ACI), le ralentissement qui a commencé en mars face à des taux d’intérêt majorés s’est confirmé. En avril, les ventes résidentielles nationales ont chuté de 12,6 % d’un mois à l’autre. Les ventes nationales de maisons ont reculé de 8,6 % d’avril à mai 2022, après la baisse d’avril, ramenant les ventes mensuelles aux niveaux pré-COVID du deuxième semestre de 2019 (voir le graphique ci-dessous).
Les ventes ont baissé dans les trois quarts des marchés locaux, notamment dans plusieurs régions métropolitaines de recensement (RMR), comme le Lower Mainland, Calgary, Edmonton, le Grand Toronto et Ottawa. Le nombre de transactions réelles (non désaisonnalisées) en mai 2022 a baissé de 21,7 % par rapport au record pour ce mois. Un peu plus de 50 000 unités ont été vendues en mai 2022, ce qui amène les ventes tout près de la moyenne sur 10 ans pour ce mois.
Nouvelles inscriptions
En mai, le nombre de nouvelles inscriptions a augmenté de 4,5 % d’un mois à l’autre. Cette augmentation mensuelle de l’offre a été influencée par un bond dans les nouvelles inscriptions à Montréal, alors qu’elles connaissaient un léger recul dans le Grand Toronto.
Étant donné la baisse des ventes et l’augmentation du nombre de nouvelles inscriptions en mai, le ratio des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions au pays a reculé pour s’établir à 57,5 %, son plus bas niveau depuis avril 2019. Ce n’est pas très loin de la moyenne à long terme de 55,1 %.
Selon le ratio des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions, près de trois quarts des marchés locaux étaient en équilibre (se situant à l’intérieur d’un écart type de la moyenne à long terme) en mai 2022, ce qu’on n’avait pas vu depuis l’automne 2019. Un peu moins d’un quart des marchés étaient favorables aux propriétaires-vendeurs, tandis qu’un petit nombre étaient favorables aux acheteurs.
On comptait 2,7 mois d’inventaire à l’échelle nationale à la fin de mai 2022. Ce résultat demeure faible, mais néanmoins d’un mois supérieur au déficit record d’inventaire enregistré il y a à peine six mois. La moyenne à long terme de cette mesure est d’un peu plus de cinq mois.
Prix des maisons
L’IPP MLS® global et composé non désaisonnalisé était tout de même en hausse de 23,8 % d’une année à l’autre en avril, bien qu’il s’agisse d’une chute marquée par rapport à l’augmentation record de presque 30 % enregistrée à peine deux mois plus tôt.
En mai 2022, l’Indice des prix des propriétés MLS® global et composé a enregistré une baisse de 0,8 % d’un mois à l’autre, après une baisse de 1,1 % en avril.
Sur le plan régional, la plupart des reculs mensuels ont été observés en Ontario. Si les prix ont baissé dans la majorité des marchés ontariens en mai, ils ont augmenté dans les régions de villégiature.
Les prix ont grimpé sur l’île de Vancouver, mais étaient stables dans le Grand Vancouver. Ils ont baissé légèrement dans la vallée du Fraser et de façon plus marquée à Chilliwack. À l’exception de modestes gains à Saskatoon et à Winnipeg, les prix n’ont guère changé dans les Prairies.
Par contre, le Québec, le Nouveau-Brunswick et l’Île-du-Prince-Édouard ont continué d’enregistrer des gains notables, tandis que la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador ont progressé plus timidement.
En mai, l’IPP MLS® global et composé non désaisonnalisé a affiché une autre hausse, soit 19,8 %, d’une année à l’autre, ce qui représente un ralentissement marqué comparativement aux hausses records de près de 30 % de janvier et février.
En somme
Après trois mois de recul, les ventes de maisons au Canada sont revenues aux niveaux d’avant la COVID; elles étaient quelque 30 % au-dessus de ces niveaux pendant 18 mois jusqu’en février. Le plus grand ralentissement a été constaté en Ontario, surtout à l’extérieur du centre de Toronto. Les nouvelles inscriptions ont augmenté, mais les inventaires restent faibles. Le ratio des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions au pays a nettement reculé pour s’établir à 57,5 %, son plus bas niveau depuis le début de 2019. Les prix ont baissé modérément, ramenant le gain sur un an à 19,8 %, contre 23,6 % en avril. Le prix moyen est maintenant en hausse de seulement 3,4 % d’une année à l’autre, contre le sommet de 11 % atteint en février.
Le marché de Toronto se calme, mais pas autant que ceux des banlieues proches et surtout des banlieues éloignées (comme London, Woodstock, Barrie). Le ratio des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions pour l’ensemble de l’Ontario a plongé sous les 50 %, ce qui ne s’était jamais vu que dans la récession de 2009 et les jours sombres du début des années 1990. Ailleurs, le marché reste relativement serré en Alberta, bien que les prix plafonnent. Vancouver, Ottawa et Montréal se situent entre les extrêmes.
Les taux d’intérêt ont augmenté fortement par rapport aux creux atteints pendant la COVID. Les taux hypothécaires ont fait de même, passant d’aussi peu qu’environ 1,5 % à presque 5 % pour un taux fixe sur cinq ans. Les taux variables sont en voie d’atteindre 4 à 4,5 % d’ici la fin de l’année. D’ici la fin de l’été, les garanties de taux favorables auront expiré et la nouvelle réalité des taux d’intérêts prendra tout son sens. Les tests de résistance au taux contractuel plus 200 points de base se font maintenant à presque 7 %; ils passeront aussi au-delà de 5,25 % pour les taux variables.
De nombreux Canadiens cherchant à acheter une maison prévoient maintenant que les prix continueront de baisser dans certaines régions. L’évolution des attentes contribuera aussi à la correction du marché. Par ailleurs, un rapport de la SCHL indique que les mises en chantier d’habitations ont fortement augmenté en mai. Il se fait davantage de construction que jamais depuis les années 1950. Alors que le taux de chômage est à son plus bas, la construction est entravée par un nombre record de postes vacants dans le secteur, par des pénuries de matériaux et par des taux de salaire en hausse. Les coûts de construction ont fortement augmenté dans la dernière année. Avec des taux hypothécaires qui seront plus hauts, le ralentissement des ventes pourrait mener à une baisse des mises en chantier d’habitations l’année prochaine.
Dernier élément, la Réserve fédérale américaine a haussé les taux de 75 points de base aujourd’hui, intensifiant la lutte contre l’inflation. Voilà qui ouvre la voie à une hausse de 75 points de base de la Banque du Canada lors de sa prochaine réunion, le 13 juillet. On prévoit maintenant que le taux directeur américain, le taux à un jour des fonds fédéraux, dépassera les 4 % d’ici la fin de l’année. La banque centrale du Canada a déjà annoncé son intention de hausser plus vigoureusement le taux à un jour au Canada, laissant entendre qu’il faudra plus de 3 % pour briser l’élan de l’inflation. Il est aujourd’hui à seulement 1,5 %. Une autre correction du marché du logement est probable dans les prochains mois. Étant le secteur de l’économie le plus sensible au taux d’intérêt, le logement est le principal mécanisme de transmission par lequel la politique monétaire peut ralentir l’économie et maîtriser l’inflation.