Publié par Sherry Cooper
Les marchés de l’habitation canadiens se resserrent, faisant encore grimper les prix.
Cherchons maisons à vendre
L’abordabilité des maisons reste un énorme problème politique. Alors que le ministère des Finances prépare un budget, il mettra certainement de l’avant des mesures visant à faire baisser les prix. Il y aura une élection ce printemps en Ontario, et le Groupe de travail sur l’abordabilité du logement mis sur pied par le premier ministre Ford a formulé des recommandations pour accélérer la construction de logements. Les maires ontariens expriment toutefois des réticences face à certaines des propositions. Le rapport du groupe de travail préconise des mesures provinciales exécutoires autorisant des constructions allant jusqu’à quatre étages et quatre unités sur un terrain résidentiel.
Le groupe Ontario’s Big City Mayors a réagi en disant que « des mesures unilatérales sans apport municipal pourraient avoir des conséquences imprévues qui ralentiraient le développement et minerait l’appui communautaire nécessaire afin de continuer d’ajouter des logements de façon viable ».
Il ajoute que s’il est essentiel de surmonter le réflexe du « pas dans ma cour » pour réussir, il l’est tout autant de respecter la prise de décisions locale et le processus démocratique. Il y a là un obstacle à l’action décisive et rapide en cause.
Ce qui est surtout nécessaire est une augmentation radicale de la construction de logements, qui a été lamentablement limitée par des questions de zonage local, de tracasseries administratives et d’urbanisme. Ces questions ne relèvent pas du gouvernement fédéral. Par conséquent, c’est certainement des mesures palliatives, qui ne règlent pas le problème de fond de la pénurie de logements, qu’il faut attendre dans le budget fédéral du printemps.
Selon les statistiques que vient de publier l’Association canadienne de l’immeuble (ACI), la revente de maisons a augmenté légèrement en janvier 2022 par rapport au mois précédent, malgré une offre limitée. La demande excédentaire a fait monter les prix des maisons de 2,9 % pour le mois, et l’indice des prix des propriétés de 28 % d’une année à l’autre – deux nouveaux records.
« L’offre sera-t-elle nettement inférieure à la demande, comme au printemps dernier?, demande Cliff Stevenson, président de l’ACI. Les nombreux propriétaires-vendeurs potentiels qui hésitent depuis deux ans feront-ils le saut? Ça reste à voir. »
« L’idéal serait que d’ici l’été, une foule de propriétaires-vendeurs inscrivent leur propriété pour profiter du marché printanier, affirme Shaun Cathcart, économiste principal de l’ACI. On verrait alors, comme en 2021, une montée de ventes : des acheteurs déçus depuis longtemps accéderaient enfin à la propriété, et la croissance des prix ralentirait probablement si le bassin d’inscriptions était plus large. Le marché aurait bien besoin de tout ça, mais tout dépendra du nombre de propriétés mises en vente dans les prochains mois. »
Nouvelles inscriptions
En janvier, les nouvelles inscriptions nationales ont chuté de 11 % d’un mois à l’autre en janvier. Plus de la moitié de cette baisse est attribuable au Grand Toronto (voir le graphique 1 ci-dessous).
En raison de la légère hausse des ventes et de la forte baisse du nombre d’inscriptions en janvier, le ratio des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions a grimpé à 89,4 %, comparativement à 78,7 % en décembre (graphique 2 ci-dessous). Il s’agit du deuxième résultat le plus élevé jamais enregistré pour cette mesure, à peine inférieur au record de 90,2 % établi en janvier dernier. Notons que la moyenne à long terme est de 55 %.
Plus que jamais, les marchés locaux étaient favorables aux propriétaires-vendeurs (dans une proportion de 85 %), le ratio des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions étant supérieur de plus d’un écart type par rapport à sa moyenne à long terme en janvier 2022. Le 15 % restant des marchés locaux étaient en équilibre.
On ne comptait que 1,6 mois d’inventaire à l’échelle nationale à la fin de janvier 2022. À égalité avec décembre 2021, c’est le niveau le plus bas jamais enregistré. La moyenne à long terme de cette mesure est d’un peu plus de cinq mois.
Prix des maisons
Les conditions du marché étant plus serrées que jamais, l’Indice des prix des propriétés MLS® (IPP MLS®) global et composé a connu en janvier 2022 une hausse record de 2,9 % d’un mois à l’autre. Il affiche ainsi une croissance semblable à celle des trois derniers mois.
L’IPP MLS® global et composé non désaisonnalisé a affiché une hausse record de 28 % d’une année à l’autre en janvier.
Selon les analyses nationales, en Colombie-Britannique, la croissance des prix d’une année à l’autre correspond à la moyenne canadienne de 28 %; elle reste plus faible à Vancouver, près de la moyenne provinciale à Victoria, et plus élevée presque partout ailleurs dans la province.
Cette augmentation se maintient autour de 5 % à 10 % en Alberta et en Saskatchewan, et avoisine les 13 % au Manitoba.
L’Ontario a pour sa part maintenu une augmentation des prix de plus de 30 % d’une année à l’autre en janvier, et le Grand Toronto a rattrapé la croissance provinciale. Le reste de la province est assez contrasté, avec des hausses de 25 % à 40 % d’une année à l’autre sauf à Ottawa, qui affiche une croissance de 16 %.
Dans le Grand Montréal, la croissance des prix d’une année à l’autre se maintient légèrement au-dessus de 20 %, tandis que Québec a enregistré une hausse d’environ 10 %.
Enfin, la croissance des prix d’une année à l’autre dépasse 30 % au Nouveau-Brunswick (davantage dans le Grand Moncton, moins à Fredericton et à Saint John), 27 % sur Île-du-Prince-Édouard, et 12 % à Terre-Neuve-et-Labrador.
En somme
La plupart des pays développés connaissent depuis deux ans une demande excédentaire de logements qui a entraîné une hausse des prix. Le Canada a toutefois la plus grande pénurie de logements des pays du G7. Tout a commencé à la fin 2015, quand le gouvernement fédéral a décidé de recevoir bien davantage d’immigrants économiques. Le Canada est « sous-peuplé » et accueille favorablement une croissance de la population, au contraire de bien d’autres pays. Il y a de nombreux emplois vacants, et une augmentation de la population signifie davantage de croissance économique et de prospérité au Canada.
Cependant, le gouvernement fédéral a oublié de prévoir du logement pour tous les nouveaux résidents. De fait, les gouvernements de tous les paliers ont omis de planifier afin de fournir les logements supplémentaires nécessaires à tous ces nouveaux venus, sans parler de logements abordables.
L’immigration nette du Canada est de 6,375 par 1000 habitants, la huitième plus élevée au monde. Environ 1,8 million de personnes de plus vivent au Canada en 2021 qu’il y a cinq ans, dont quatre sur cinq ont immigré ici depuis 2016.
Il n’y a pas de mystère. Le gouvernement ne peut pas blâmer les acheteurs étrangers ou les investisseurs pour la pénurie de logements. Elle découle d’une planification inadéquate et de politiques et processus dépassés.