Publié par Sherry Cooper
Le marché canadien de l’habitation semble près du creux.
Le marché de l’habitation pourrait être sur le point de rebondir
L’Association canadienne de l’immobilier (ACI) affirme que les ventes ont progressé de 2,3 % en février par rapport au mois précédent. Les propriétaires et les acheteurs ont été rassurés par les indications de la Banque du Canada qu’elle marquerait probablement une pause dans les hausses de taux, pour la première fois depuis un an.
L’indice composé des prix des maisons au Canada a baissé de 1,1 % en février, la plus faible diminution mensuelle face aux augmentations rapides des taux d’intérêt de la dernière année. La montée inédite du taux directeur, passé d’à peine 25 points de base (pb) à 450 pb, a non seulement ralenti l’habitation – le secteur le plus sensible aux taux d’intérêt –, mais a maintenant aussi déstabilisé les marchés financiers mondiaux.
Dans la dernière semaine, trois institutions financières régionales d’importance ont fait faillite aux États-Unis. La Réserve fédérale, la société fédérale d’assurance-dépôts (FDIC) et le Trésor américains ont pris des mesures décisives pour rassurer les clients que tous leurs dépôts, assurés ou non, seraient remboursés. La Fed va fournir un filet de sécurité à toutes les institutions financières.
Le cours des actions a plongé lundi, et les capitaux fuyant vers le refuge des titres du Trésor et autres obligations gouvernementales a entraîné une baisse inédite des taux d’intérêt à court terme. Comme le gouvernement américain a insisté que les faillites seraient circonscrites, les marchés ont en partie inversé certaines des tendances de lundi.
Aujourd’hui toutefois, le cas du Crédit Suisse a de nouveau secoué les marchés. Les actions des banques et les taux d’intérêt ont chuté encore plus bas. Quelques remarques inquiétantes du plus grand actionnaire de Crédit Suisse Groupe AG, mercredi, ont suffi à déclencher un délestage qui s’est propagé dans tous les marchés mondiaux.
Les actions de Crédit Suisse ont perdu 24 % dans le plus grand volume de vente jamais vu en un jour. Ses obligations ont baissé à des niveaux témoignant d’une profonde détresse financière. Les titres échéant en 2026 ont perdu 20 cents, ressortant à 67,5 cents au dollar à New York. En conséquence, leur rendement dépasse de 20 points de pourcentage celui des titres du Trésor américain.
Pour les investisseurs mondiaux, déjà inquiets après l’effondrement soudain de trois banques américaines régionales, la crise croissante de Crédit Suisse est une raison de plus de liquider les actifs risqués et de se réfugier dans les obligations gouvernementales. Toute cette volatilité révèle les errements passés des investisseurs et des institutions. La vente en panique n’est jamais une bonne idée, et les opérateurs se précipitent vers des valeurs sûres, ce qui fait plonger les rendements des obligations gouvernementales, flamber le cours de l’or et inciter les ménages à suspendre leurs dépenses discrétionnaires et leurs investissements. Voilà qui peut suffire à déclencher une récession, même quand les marchés du travail sont exceptionnellement serrés et le nombre de postes vacants est exceptionnellement élevé.
Les actions des banques canadiennes ont subi le contrecoup malgré leur supervision réglementaire beaucoup plus rigoureuse. Les craintes d’une contagion et d’une récession persistent. La priorité pour les banques centrales est d’apaiser les marchés, en mettant la lutte contre l’inflation au second rang jusqu’à ce que les craintes soient apaisées.
Larry Fink, PDG de la société Blackrock, nous a rappelé hier que de précédents cycles de resserrement rapide des taux d’intérêt « ont mené à de spectaculaires déboires financiers », comme la faillite du comté d’Orange (Californie), en 1994, et la crise des caisses d’épargne et de crédit des années 1980 et 1990. « Nous ne savons pas encore si les conséquences du crédit facile et des changements dans la réglementation se répercuteront dans l’ensemble du secteur américain des banques régionales (comme dans le cas des caisses d’épargne et de crédit), et s’il faut s’attendre à davantage de saisies et de fermetures », a-t-il dit.
C’est dans ce contexte que nous discutons du marché canadien de l’habitation. La forte hausse des coûts des emprunts au cours de la dernière année a entraîné une des baisses les plus rapides des prix des maisons au Canada. Les ventes étaient en hausse en février, les marchés se sont resserrés, et la baisse des prix d’un mois à l’autre a ralenti.
Nouvelles inscriptions
En février, le nombre de nouvelles inscriptions a chuté de 7,9 % d’un mois à l’autre, des baisses à deux chiffres ayant été enregistrées dans plusieurs grands marchés, notamment en Ontario.
Étant donné le recul considérable des nouvelles inscriptions et la hausse des ventes en février, le ratio des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions a atteint 58,4 %, soit un record depuis avril dernier. La moyenne à long terme de cette mesure se situe à 55,1 %.
On comptait 4,1 mois d’inventaire à l’échelle nationale à la fin de février 2023, une diminution par rapport à 4,2 mois à la fin de janvier. C’est la première fois que cette mesure montre des signes de resserrement depuis l’automne 2021. Elle se situe par ailleurs un mois complet en dessous de sa moyenne à long terme.
Prix des maisons
En février 2023, l’Indice des prix des propriétés MLS® (IPP MLS®) global et composé a reculé de 1,1 % d’un mois à l’autre, soit environ seulement la moitié de la baisse enregistrée le mois précédent, et la diminution d’un mois à l’autre la plus faible depuis mars dernier.
L’IPP MLS® global et composé se situe à 15,8 % en dessous de son sommet de février 2022.
La plupart des régions de l’Ontario et certaines régions de la Colombie-Britannique ont connu une chute des prix plus élevée que la moyenne nationale, alors que les prix ont diminué dans une moindre mesure partout ailleurs. Les marchés de Calgary, Regina, Saskatoon et St. John’s se démarquent avec des prix restant près des sommets enregistrés. Les prix ont commencé à se stabiliser l’automne dernier dans les Maritimes. On observe actuellement la même tendance dans certains marchés de l’Ontario.
Le tableau ci-dessous montre la baisse du prix des habitations au Canada selon l’IPP MLS et dans certaines villes, depuis les sommets d’il y a un an avant que la Banque du Canada commence à hausser les taux d’intérêt. Le deuxième tableau est plus détaillé. Les plus fortes baisses de prix ont été constatées dans le Grand Toronto, à Ottawa et dans le Grand Vancouver, où les hausses de prix avaient été spectaculaires pendant le confinement lié à la COVID.
Malgré ces fortes baisses, les prix restent environ 28 % au-dessus des niveaux d’avant la pandémie.
En somme
Le mois passé, j’avais écrit : « La Banque du Canada a promis de suspendre les hausses de taux pourvu que l’inflation continue de s’atténuer. Nous ne verrons pas de mouvement en mars. Cependant, le chemin à parcourir pour parvenir à une inflation de 2 % sera tortueux. Je ne m’attends à aucune baisse de taux cette année, et il pourrait encore y avoir des augmentations. Les marchés escomptent de nouvelles mesures de resserrement de la part de la Fed.
« Rien ne garantit que les taux d’intérêt ont atteint leur sommet au Canada. Nous surveillerons attentivement le marché du travail et les dépenses de consommation. »
Au vu des événements de la dernière semaine, tous les paris sont ouverts en ce qui concerne la politique des banques centrales jusqu’à ce que la volatilité des marchés s’apaise et que les craintes d’une crise financière mondiale diminuent radicalement. Même si les taux directeurs n’ont pas changé, les taux d’intérêt déterminés par le marché ont chuté abruptement, ce qui implique que les marchés craignent une récession et le chaos. Comme je l’ai déjà dit, la priorité de la Fed et des autres banques centrales est maintenant d’apaiser ces craintes. Jusqu’à ce que ce soit fait, la lutte contre l’inflation est bien secondaire. J’espère que les choses se redresseront bientôt, car ce qui se passe aujourd’hui ne sert personne.
Selon l’expérience, le moment pourrait présenter une excellente occasion d’acquérir des actions de toute institution financière judicieusement gérée. Il s’agit toutefois de faire attention : il est impossible de savoir d’avance à quel rythme les marchés évolueront, et il peut être tout aussi pénible d’agir trop tôt que de rater une bonne affaire.