Publié par Sherry Cooper
La forte progression de l’emploi au Canada en février remet en question la pause des hausses de taux d’intérêt.
Le marché du travail canadien remet en question la pause des hausses de taux d’intérêt
Les données de février de l’Enquête sur la population active, publiées aujourd’hui, sont beaucoup plus fortes que prévu, au point qu’il faut se demander combien durera la pause des hausses de taux de la Banque du Canada. Après le gain de 150 000 emplois en janvier, les économistes s’attendaient à une modeste augmentation de 10 000 emplois, et un taux de chômage de 5,1 %. Au lieu, l’économie a ajouté 21 800 emplois en février, et le taux de chômage est resté à 5 %, près de son creux record.
Voilà six mois consécutifs de création d’emplois, faisant que depuis septembre, c’est au total 348 000 emplois qui ont été créés. Le gouverneur de la Banque du Canada Tiff Macklem a maintes fois répété que le marché de l’emploi est surchauffé et étonnamment fort. Sa pause des hausses de taux d’intérêt a pour but de laisser le temps d’évaluer l’effet des augmentations cumulatives des taux sur l’économie canadienne. Certains secteurs ont ralenti, comme le logement, l’investissement des entreprises et l’accumulation de stocks. Cependant, le marché du travail continue à créer des emplois, et le nombre de postes vacants reste élevé.
Une bonne part de la création d’emplois s’est faite dans les soins de santé et l’assistance sociale. Le nombre de postes vacants y est demeuré élevé, alors que la demande de main-d’œuvre non comblée s’est atténuée dans d’autres secteurs. L’emploi gouvernemental a aussi participé aux embauches.
Par contre, l’emploi a reculé dans les services aux entreprises, les services relatifs aux bâtiments et autres services de soutien. Après avoir enregistré une hausse notable au début de l’année, l’emploi a peu varié dans le commerce de gros et de détail. Le nombre de travailleurs de la construction a aussi peu varié en février après avoir augmenté pendant deux mois consécutifs en décembre et en janvier.
Autre fait troublant pour la Banque du Canada, l’inflation salariale a augmenté. Par rapport à un an plus tôt, le salaire horaire moyen a augmenté de 5,4 %, soit le taux le plus fort depuis novembre.
Le taux de chômage s’est maintenu à 5,0 % en février, ce qui est tout près du creux record de 4,9 % enregistré en juin et en juillet 2022.
L’emploi surpasse aussi les attentes aux États-Unis
Alors que les marchés monétaires estiment assez probable une augmentation de taux de 50 points de base lors de la réunion de mars de la Réserve fédérale, la vigueur persistante de l’emploi pourrait contraindre les décideurs à continuer de décréter de fortes augmentations, ayant prévenu que les taux devraient peut-être monter bien plus haut et y rester plus longtemps pour mater l’inflation. L’emploi aux États-Unis a augmenté plus que prévu en février, tandis qu’une mesure générale de la croissance des salaires indique un ralentissement. Le tableau est donc mitigé au moment où la Réserve fédérale se demande s’il faut ou non accentuer les augmentations de taux.
Le taux de chômage a augmenté légèrement, à 3,6 %, par suite d’une augmentation de la population active. Les salaires mensuels ont progressé au rythme le plus faible depuis un an. Les salaires horaires moyens ont grimpé de 4,6 % par rapport à un an plus tôt. Cela dit, les salaires des travailleurs de production et non surveillants – qui représentent la majorité des travailleurs américains et n’occupent pas des postes de direction – ont augmenté de 0,5 % d’un mois à l’autre. Il s’agit de la plus forte hausse depuis trois mois, et elle est principalement le fait de secteurs de services.
En somme
Aux États-Unis, les gains de l’emploi sont tellement supérieurs aux attentes qu’ils ouvrent la voie à ce que la Fed augmente son taux à un jour de 50 points de base – malgré plusieurs signes de ralentissement dans le rapport.
Dans ce contexte, la Banque du Canada attendra les prochaines données sur l’inflation et sur l’économie pour évaluer le bien-fondé de sa décision de marquer une pause dans les hausses de taux. Le cours du dollar canadien sera assurément volatil. Les responsables des politiques considèrent que des pressions salariales de l’ordre de 4 à 5 % ne permettraient pas de ramener l’inflation à la cible de 2 %. Restez à l’écoute!