Publié par Sherry Cooper
La Banque du Canada maintient son taux à un jour.
La Banque du Canada maintient le niveau des taux et de l’assouplissement quantitatif – jugeant que la tendance haussière de l’inflation et la tendance baissière du PIB sont temporaires
La Banque du Canada a laissé le taux directeur de financement à un jour à 0,25 % et ses achats d’obligations du gouvernement du Canada à leur niveau actuel. Le Conseil de direction a renouvelé son engagement à éviter d’augmenter les taux avant que les dommages causés par la pandémie ne soient complètement réparés. L’achat d’obligations – pratique qu’on appelle assouplissement quantitatif – à raison de 3 milliards de dollars par semaine baissera à mesure que l’économie se redresse. En avril, à sa dernière réunion, la Banque avait déjà réduit ses achats d’obligations du gouvernement du Canada, de 4 milliards de dollars par semaine à 3 milliards. Elle était une des premières banques centrales d’une économie avancée à passer à une politique moins expansionniste lorsque, en avril, elle a accéléré le calendrier en vue d’une éventuelle augmentation des taux d’intérêt et elle a réduit ses achats d’obligations.
Le point de vue de la Banque sur l’économie intérieure semble avoir peu changé même si le Rapport sur la politique monétaire (RPM) d’avril avait surestimé la croissance du PIB au premier trimestre de 1,4 point de pourcentage. De fait, l’énoncé de politique d’aujourd’hui note que la croissance du PIB au premier trimestre « a été robuste, à 5,6 % » et que les détails du rapport indiquent que « la confiance est en hausse et la demande résiliente ». Quant au deuxième trimestre, les mesures de confinement liées à la troisième vague de la pandémie « tempèrent l’activité économique […] essentiellement comme nous nous y attendions ». On peut noter que le RPM d’avril projetait une croissance de 3,5 % du PIB au deuxième trimestre, alors qu’elle serait de 0 % selon le consensus, avec un risque de baisse.
La Banque a aussi relevé que : « Des données récentes sur l’emploi montrent que les personnes qui travaillent dans les secteurs à contact étroit ont à nouveau été les plus affectées par la situation. Le taux d’emploi reste bien inférieur à son niveau d’avant la pandémie, et les travailleurs à faible salaire, les jeunes et les femmes sont encore les plus durement touchés par les pertes d’emploi. » Le graphique ci-dessous indique que le marché du travail reste sous la cible de la Banque pour une pleine reprise.
La Banque du Canada est optimiste pour le moyen terme
« Puisque la vaccination se déroule plus vite que prévu et que les restrictions sanitaires provinciales sont en voie de s’assouplir au cours de l’été, l’économie canadienne devrait rebondir avec force, tirée par les dépenses de consommation. Nous nous attendons à ce que l’activité sur le marché du logement se modère, mais reste à un niveau élevé. »
En ce qui concerne l’inflation, il n’y a pas de surprise. L’énoncé note que l’inflation mesurée est montée autour de la limite supérieure de la fourchette de maîtrise de l’inflation, qui va de 1 à 3 %, en raison des effets de glissement annuel et des prix de l’essence. L’augmentation des mesures de l’inflation fondamentale est aussi attribuée à des facteurs temporaires. La Banque prévoit que l’inflation globale restera autour de 3 % tout l’été, puis redescendra vers la fin de l’année.
La Banque souligne aussi un motif de prudence : le marché du travail est encore loin d’être rétabli. En outre, il y a de l’incertitude quant aux variants de la COVID.
Sa conclusion n’a guère changé. Elle réitère qu’il subsiste « une marge de capacités excédentaires considérable » et que les taux directeurs resteront à la limite inférieure jusqu’à ce que « les capacités excédentaires se résorbent », ce que le RPM d’avril entrevoyait au deuxième semestre de 2022. Pour ce qui est de réduire encore les achats d’obligations, « l’évaluation […] de la robustesse et de la durabilité de la reprise » guidera la décision.
Le dollar canadien a de nouveau retenu peu l’attention, l’énoncé soulignant les récents gains et l’augmentation des prix des produits de base. Le marché pourrait considérer l’absence d’inquiétude comme le signal d’une vigueur soutenue.
En somme
La Banque du Canada regarde au-delà des tendances « transitoires » à la hausse de l’inflation et à la baisse du PIB. Comme les taux de vaccination continuent de grimper sensiblement et les provinces commencent graduellement à relancer l’activité, l’économie rebondira fortement à partir de juin.
Les perspectives de croissance à court terme paraissant de plus en plus prometteuses, les inquiétudes concernent maintenant la hausse des prix des intrants de production et le risque que la remontée rapide de la demande des consommateurs augmente les pressions inflationnistes. Pour le moment, la Banque du Canada postule que les augmentations à court terme de l’inflation des prix à la consommation s’avéreront « transitoires ». Cependant, il y a aussi eu des signes d’une poussée plus difficile à balayer dans la plupart des indicateurs sous-jacents d’augmentation des prix, y compris les mesures de l’inflation fondamentale privilégiées par la Banque, grimpant vers l’objectif de 2 % d’inflation, voire au-delà.
La réunion de juillet sera sans doute un peu plus intéressante, et la Banque devrait fournir davantage de détails dans un nouveau Rapport sur la politique monétaire. Nous ne voyons pas de raison de réviser radicalement nos prévisions pour le moment. Les indications de la Banque du Canada selon lesquelles les taux devraient peut-être commencer à monter au deuxième trimestre de l’année prochaine restent plausibles. Il semble que la grande question sera de savoir si la Banque du Canada va encore réduire ses achats d’actifs. La Banque n’a pas signalé qu’elle était sur le point de le faire (nous ne pensions pas qu’elle le ferait), mais elle a dit que les décisions sur le niveau des achats seraient guidées par son évaluation de la vigueur et de la durabilité de la reprise. Si les prochaines données concordent avec les prévisions de la Banque, il se pourrait qu’elle réduise à nouveau des achats d’obligations en juillet, à 2 milliards de dollars par semaine au lieu de 3 milliards. Sinon, cela pourrait se faire en septembre, sachant que la Banque veut éviter de prendre trop de place sur le marché obligataire (elle en occupait 44 % à la fin mai). En même temps, elle veut se préparer à passer de l’assouplissement quantitatif au réinvestissement bien avant la première augmentation des taux d’intérêt.