Publié par Sherry Cooper
Hausse exceptionnelle du taux directeur de la Banque du Canada.
La Banque du Canada hausse les taux de 50 points de base, et laisse entrevoir que ce n’est pas fini
Le Conseil de direction de la Banque du Canada a augmenté le taux directeur à un jour de 50 points de base d’un coup, pour la première fois depuis 22 ans. Des signes l’avaient laissé entrevoir, et la Réserve fédérale américaine devrait en faire autant le mois prochain. La Banque du Canada est la première banque centrale du G7 à agir aussi décisivement, mais la Banque de Nouvelle-Zélande a aussi haussé ses taux d’un demi-point de pourcentage aujourd’hui. Au vu de la poussée d’inflation et de la vigueur de l’économie canadienne, une autre augmentation semblable reste bien possible.
La Banque constate maintenant qu’une inflation s’annonce, en conséquence non seulement de perturbations de l’offre, mais aussi d’une demande excédentaire : « Au Canada, la croissance est forte et l’économie entre dans une phase de demande excédentaire. Le marché du travail est tendu et la croissance des salaires, qui a retrouvé son rythme d’avant la pandémie, est en hausse. Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à déclarer qu’elles ont de la difficulté à répondre à la demande, et qu’elles peuvent répercuter les coûts plus élevés des intrants sur leurs clients en haussant les prix. »
Selon la Banque : « La croissance semble avoir été plus vigoureuse au premier trimestre qu’on le prévoyait en janvier et devrait augmenter au deuxième trimestre. Avec la levée des mesures sanitaires, les dépenses de consommation se raffermissent. La reprise des exportations et des investissements des entreprises se poursuivra, soutenue par la solide demande étrangère et les prix élevés des produits de base. L’activité sur le marché du logement, qui a été exceptionnellement forte, devrait se modérer. »
Le Conseil de direction a de nouveau rehaussé sa prévision de l’inflation. La Banque s’attend maintenant à ce que l’inflation mesurée par l’IPC atteigne presque 6 % en moyenne durant la première moitié de 2022 et reste bien au-dessus de la fourchette de maîtrise de l’inflation tout au long de l’année. Elle devrait ensuite baisser pour s’établir à environ 2½ % au deuxième semestre de 2023 et retourner à la cible de 2 % en 2024. Il y a un risque croissant que les attentes relativement à une inflation élevée s’enracinent.
Puisque l’économie entre dans une phase de demande excédentaire et que l’inflation demeure bien au-dessus de la cible, le Conseil de direction juge que les taux d’intérêt devront encore augmenter. La Banque met aussi fin au réinvestissement et amorcera le resserrement quantitatif le 25 avril. Les obligations du gouvernement du Canada inscrites au bilan de la Banque qui arrivent à échéance ne seront plus remplacées, ce qui fera diminuer la taille du bilan au fil du temps. Les taux d’intérêt seront soumis à une pression haussière d’autant plus forte.
En somme
Les opérateurs boursiers parient que le taux à un jour approchera les 3,0 % d’ici un an. Dans le Rapport sur la politique monétaire (RPM) d’aujourd’hui, la Banque révise à la hausse son estimation du taux directeur neutre, le situant entre 2,0 % et 3,0 % – soit à 25 points de base de plus que son estimation d’il y a un an. Cette estimation est celle du taux directeur concordant avec la croissance non inflationniste potentielle de l’économie.
D’après certains indices, la hausse des taux d’intérêt a déjà commencé à ralentir le marché canadien de l’habitation. « Les reventes devraient s’affaiblir quelque peu au deuxième trimestre sous l’effet de la hausse des taux d’emprunt, lit-on dans le RPM. Le bas niveau des stocks de logements neufs et existants à vendre devrait soutenir à court terme la construction et les rénovations. »
Les rendements des obligations ont augmenté en prévision de la décision de la Banque du Canada. Le taux d’un prêt hypothécaire à taux fixe est en hausse, entre 3,5 % et 4,0 %. Cette évolution pourrait marquer un point tournant, car les emprunteurs hypothécaires doivent démontrer leur admissibilité en fonction du taux maximum de 5,25 % ou d’un taux supérieur de 2 points de pourcentage au taux contractuel proposé. Nous sommes maintenant au-delà du seuil de 2 points de pourcentage, ce qui réduit le pouvoir d’achat de nombreux acheteurs.